Au 19ème siècle, dans les bals publics, la Danse à la mode est le quadrille, très codifié et ne laissant aucune place à l’improvisation, il s’exécute en couple par quatre, de manière très précise.
En 1825 les hommes s’octroient des solos endiablés, saut, tête en bas et jambes en l’air, c’est l’ère de ce que l’on appellera « le cavalier seul ». Puis en 1829, soit 4 ans plus tard, les femmes s’autorisent à danser elle-aussi seule, sans être dirigé par un homme, elles performent. Leurs exploits sont nommés : le Chahut, puis chahut-cancan, puis cancan par similitude au tortillement du canard.

Dans le contexte de l’époque, cette Danse devient un acte politique : tout d’abord, les robes cachaient les jambes, donc les dévoiler était une façon pour les femmes de s’émanciper, de se libérer et de prendre le pouvoir. Montrer ses jambes ne correspondait en aucun cas à un appel au sexe, comme certains ont pu le penser.
De plus, chaque pas du Cancan a un sens bien défini :

Le Coup de cul, pour se moquer de la bourgeoisie et de la noblesse, la cathédrale (vous savez quand elles sont en cercle ou à deux et collent toutes leurs pieds au centre et développent leurs jambes vers le haut?) c’était pour se jouer de l’église.

Le coup de cul

Photo tirée du fil de Jean Renoir “French Cancan”

La cathédrale

Photo tirée du film de Jean Renoir “French Cancan”

Le petit chien, qui parle de la soumission des femmes, le port d’armes, qui se moque de l’armée, la guitare, assimilée à la masturbation.

Le port d’arme

La guitare

Affichiste : Ercole Brini

La mayonnaise, ce moulinet de jambes qui évoque la mixité possible entre les différentes castes ou nationalités. Le tire-bouchon qui évoque le privilège qu’ont les hommes d’ouvrir les bouteilles. La mitraillette, inventée pendant l’occupation nazi :  les danseuses tombent les unes après les autres en grand-écart et se relèvent la tête haute et les bras en l’air :  c’est pour dire nous sommes là, et malgré tout on ne se laisse pas abattre, acte de résistance, non ?

La mitraillette

Photo tirée du fil de Jean Renoir “French Cancan”

Jugé ainsi trop provocant, indécent et scandaleux, en 1831 une loi interdit le cancan et les danseurs et danseuses sont surveillé.e.s et parfois arrêté.e.s par la police. Mais cette façon de s’exprimer va aussi éveiller la curiosité, attirer les foules et donc perdurer.

Plus tard (1860), le mouvement se professionnalise, les femmes avec leurs figures improbables sont mieux payées que les hommes, et Jacques Offenbach crée « le galop infernal » pour son opéra Orphée aux enfers, qui devient l’hymne des danseuses de Cancan (1868). Les cancaneuses se créent des personnages  et se donnent des noms atypiques et surprenants : la goulue, Nini pattes en l’air, Grille d’égout, ou encore Rigolboche qui inventa en 1857 le célèbre jeux de battement de  jambes.

Peintre : Georges Mouton

Peintre : Picabia

Elles sont audacieuses, insoumises, extravagantes et prennent pleinement place en 1880 dans les cabarets qui s’ouvrent à Paris :  le moulin rouge(1889), le moulin de la galette, les folies bergères pour ne citer que les plus célèbres.

Affichiste : Pierre Okley

Affichiste : Maurice Biais

Affichiste : Toulouse-Lautrec

Fin 19ème Charles Morton exporte le concept à Londres et baptise le cancan : Le French Cancan. Raison marketing oblige, il veut faire de cette danse une attraction pour les touristes !

Du bal , le cancan est passé de moyen d’expression et de revendication pour la liberté, à chorégraphie emblématique française qui fascine et fait déplacer les touristes du monde entier.

Comme une envie d’aller admirer un spectacle de French Cancan !!! Non ??